Grand mécène anglais du XXième siècle, Samuel Courtauld prit le parti de l’impressionnisme à une époque où ce mouvement n’était pas en vogue. Loin de là. Il misa sur le devenir de ce courant et réunit avec l’aide de sa femme, quelques 110 œuvres en seulement six ans entre 1923 et 1929. Parmi elles, une soixantaine de peintures ainsi que des œuvres graphiques à découvrir à la Fondation Louis Vuitton.
Parmi les artistes présentés, citons Manet, Cézanne, Seurat, Renoir, Degas, Toulouse-Lautrec, Van Gogh, Gauguin et Modigliani. Cette exposition rassemble pour la première fois à Paris depuis 60 ans, ces peintures issues de la Courtauld Gallery de Londres.
Retour en photos et commentaires sur cette exposition temporaire présentée jusqu’au 17 juin 2019.
La partie de l’exposition dédiée à Manet
La visite de l’exposition temporaire débute par un tableau iconique de Manet : Un bar aux folies bergères. Sur cette dernière œuvre majeure peinte par l’artiste en 1882, Manet traite l’espace d’une manière déconcertante. Au premier plan, se trouve Suzon, la serveuse des folies bergères qui posa pour le peintre. Son regard fixe le spectateur, elle semble perdue dans ses pensées. En réalité, sur la droite, son reflet présente la jeune femme de dos en train de converser avec un client.
L’autre chef d’œuvre exposé, Bords de Seine à Argenteuil, présente la femme de Claude Monet, chez qui le peintre résidait, accompagnée de son fils sur les berges du fleuve. L’artiste utilise des couleurs claires et des touches rapides pour traduire les effets de la lumière d’été ainsi que les ondulations à la surface de l’eau.
Edouard Manet – Un bar aux folies bergères (1882)
Edouard Manet – Bords de Seine à Argenteuil (1874)
Tout de suite, la visite plonge le visiteur dans un univers singulier qu‘on ne peut en général retrouver qu’au Musée d’Orsay.
La place de Renoir dans la collection Courtauld
Renoir faisait également parti des artistes pour lesquels Samuel Courtauld avait de l’admiration. Parmi les œuvres acquises par le mécène, La Yole, peinte en 1875 est l’une des plus remarquables et un parfait exemple de la peinture impressionniste. Renoir peignait régulièrement à Chatou, à l’ouest de Paris. Il présente dans ce tableau une scène de plaisance ensoleillée, avec une palette de couleurs dominée par les oranges et les bleus. La lumière chatoyante de l’œuvre permet de penser, de prime abord, que les rubans sur le chapeau de la rameuse sont noirs quand ils sont en réalité composés de plusieurs couleurs.
Autre œuvre de Renoir de la collection Courtauld, Le Printemps de Renoir était une des toiles les plus précieuses aux yeux du mécène anglais. Les subtils effets du soleil sur la végétation présentent les premiers pas de Renoir vers les couleurs chatoyantes et vibrantes, caractéristiques spécifiques de l’impressionnisme.
Pierre-Auguste Renoir – La Yole (1875)
L’impressionnisme de Monet
Plusieurs toiles de Monet sont également exposées dans cette exposition temporaire. Parmi elles, La Gare Saint-Lazare, qui fait partie d’une série de douze vues de la gare parisienne, réalisées en 1877. Sur cette œuvre, ce sont les nuages qui méritent votre regard. Voyez comment leur positionnement, ainsi que la tonalité d’ensemble évoquent les nuages d’un paysage en intérieur. Fabuleuse technique de l’artiste qui réalisa de longues études préliminaires pour atteindre ce résultat.
Autre œuvre dont le style est indissociable de l’impressionnisme, Antibes, montre les intenses couleurs observées par le peintre lors d’un séjour au bord de la méditerranée. Les effets du vent sur le pin, sont rendus visibles par un habile contraste des couleurs. Malgré un rendu visuel époustouflant, Monet regrettait le besoin « d’une palette de diamants et de bijoux », pour reproduire sur la toile les émotions qui l’envahissaient devant les paysages.
Claude Monet – La gare Saint-Lazare (1877)
Georges Seurat de l’impressionnisme au pointillisme
Avec Cézanne, Gauguin et Van Gogh, tous présents dans cette exposition temporaire de la Fondation Louis Vuitton, Georges Seurat est considéré comme un des quatre grands peintres du postimpressionnisme. Son évolution vers le pointillisme est intelligemment montrée, ainsi que le flair de Samuel Courtauld pour l’avènement de ce nouveau courant.
Présentées en série, les œuvres, Chevaux dans l’eau, Pêcheurs dans un bateau amarré, Pêcheur à la ligne, Homme peignant un bateau et homme dans une barque, associées aux œuvres majeures Le Pont de Courbevoie, le Chenal à Gravelines et la Jeune Femme se poudrant, constituaient à l’époque, la collection de Seurat la plus importante du Royaume-Uni.
L’exposition offre enfin la possibilité de se plonger dans l’univers d’un peintre dont la majeure partie des œuvres se trouvent en Angleterre.
Georges Seurat – Étude pour le Chahut (1889)
Georges Seurat – Jeune femme se poudrant (1890)
Georges Seurat – Chevaux dans l’eau (1883)
Georges Seurat – homme peignant un bateau (1883)
Les œuvres iconiques de Paul Cézanne
De nombreuses œuvres de Paul Cézanne sont idéalement rassemblées lors de la suite de votre visite. Parmi elles, l’Homme à la pipe de la série des représentations de paysans réalisée dans les années 1980. Le modèle qui servit pour ce tableau se retrouve également sur celui présenté juste à côté, sur le tableau des Joueurs de Cartes. Le rendu de ses tableaux correspond aux qualités, que le peintre associait aux modes de vie ruraux de l’époque.
Parmi les autres œuvres présentées de Paul Cézanne, retrouvez Nature Morte à l’Amour en plâtre, Vue sur l’Estaque et le Château d’If, Le Lac d’Annecy, Grands Arbres au Jas de Bouffan, La Montagne Sainte-Victoire au grand pin et enfin Ferme en Normandie, ensemble de tableaux vous faisant découvrir divers paysages de France, avec le regard et les couleurs propres aux impressionnistes.
Paul Cézanne – L’homme à la pipe (1896)
Paul Cézanne – Les joueurs de cartes (1896)
Van Gogh et l’influence du réalisme hollandais
Au début des années 1880, les tableaux de Van Gogh étaient sombres et son dessin expressif. Arrivé à Arles en 1888, il commence à intensifier sa palette de couleurs dont vous pouvez admirer les effets. Parmi les œuvres exposées, nous avons été marqués par l’une des œuvres les plus célèbres de la collection Courtauld : L’Autoportrait à l’oreille bandée. À la suite d’une altercation avec Paul Gauguin, l’artiste s’automutile au niveau de l’oreille gauche. Durant plusieurs semaines, il ne peut peindre car hospitalisé.
À son retour, il peint ce tableau, issu d’une série de 36 autoportraits peints en quatre ans. Cette œuvre somptueuse où l’artiste se montre vêtu d’un lourd manteau est le parfait exemple des raisons de sa dispute avec Gauguin. Il y réaffirme son engagement et sa préférence à une observation directe, quand son ami lui privilégiait l’imagination et incitait le hollandais à peindre de manière stylisée et symbolique.
Vincent Van Gogh – Autoportrait à l’oreille bandée (1889)
Vincent Van Gogh – Champ de blé avec cyprès (1889)
Les impressions de la rédaction
« La collection Courtauld : le parti de l’impressionnisme » du 20 février 2019 au 17 juin 2019 est une des expositions temporaires pour lesquelles on se rend parce qu’à chaque fois la Fondation Louis Vuitton y présente des œuvres incontournables. Rassemblée dans la galerie souterraine, on découvre la vision futuriste du mécène anglais qui permit à l’Angleterre, d’être en possession de certaines des plus belles toiles impressionnistes françaises. Celui qui misa sur l’avenir de ce courant avait tout d’un visionnaire. Pour cela, nous pouvons l’en remercier.
Pendant près d’une heure et demie de visite, chaque visiteur a le plaisir d’être époustouflé, de la première salle avec les œuvres de Manet, jusqu’aux dernières avec celles de Van Gogh.