Le Palais de Tokyo appartient aux édifices inaugurés pour l’exposition internationale de 1937 et s’appelait alors « Palais des musées d’art moderne ». Il présente l’une des plus grandes surfaces d’exposition mondiale dédiée à l’art contemporain.
Depuis le 17 octobre 2018 et jusqu’au 6 janvier 2019 il accueille une exposition temporaire surprenante, intelligente et disruptive nommée ON AIR. Vous avez l’occasion de la découvrir tous les jours sauf le mardi, de midi à minuit.
Cette exposition est un coup de cœur. Tout au long du parcours, le visiteur est plongé dans un style d’art moderne accessible à tous et dont la poésie enchante nos yeux et nos oreilles. Les arachnophobes feront-ils la paix avec les araignées?
Carte Blanche
L’artiste argentin Tomas Saraceno a eu carte blanche et en profite pour occuper les 20 000m² d’exposition qu’offre le Palais de Tokyo.
« ON AIR se présente comme un écosystème en mouvement, accueillant une chorégraphie à plusieurs voix entre humains et non-humains, où les oeuvres révèlent les rythmes et trajectoires communs, fragiles et éphémères qui unissent ces mondes. ON AIR se construit grâce à la multitude de ces présences, animées et inanimées, qui y cohabitent. L’exposition est comme un ensemble, qui révèle la force des entités qui peuplent l’air et la manière avec laquelle elles nous affectent : du dioxyde de carbone (CO2) à la poussière cosmique, des infrastructures et fréquences radio à de nouveaux couloirs de mobilité aériens. Ces histoires invisibles, qui composent la nature dont nous faisons partie, nous invitent à repenser poétiquement notre manière d’habiter le monde – et à réévaluer notre manière d’être humain. » indique Rebecca Lamarche-Vadel, commissaire d’exposition au Palais de Tokyo .
Avant d’entrer dans la première salle d’exposition, une enceinte est placée au sol. L’artiste et son équipe ont émis l’hypothèse qu’une espèce d’araignée vivant depuis toujours dans les sous-sols du Palais serait capable de ressentir les ondes gravitationnelles, celles issues de « la collision de deux trous noirs survenue il y a plus d’un milliard d’année ».
Sur des toiles de la première salle, on trouve des capteurs et une araignée spéciale. Si cette dernière capte une onde gravitationnelle, elle se mettra à vibrer, ce qui sera ressenti par toute la toile. Reliée à un capteur, celui-ci transmettra à un ordinateur les ondes issues de ces vibrations pour proposer un son audible depuis l’enceinte à l’entrée.
Les toiles en soie d’araignées
Lorsque vous entrez dans la première salle, vous découvrez 76 grands cubes sans paroi mais dont les arêtes ont servi de support pour les toiles d’araignée. Les seules sources de lumières proviennent de petites LED éclairant les toiles.
Le reste de la salle reste dans le noir. Le travail fourni, tant par l’artiste que par les araignées, est colossale. Ces toiles représentent une extension de l’araignée : elles comblent leur surdité et leur cécité. Pour chaque mouvement d’air, la toile bouge et vibre. Ces mouvements sont leurs yeux et leurs oreilles.
Plus loin, on découvre « Sounding the air », une œuvre composée de 5 filaments de soie d’araignées qui flottent et résonnent dans l’air. Ce qui fait s’élever et descendre ses filaments, ce sont les courants d’air : le passage des visiteurs, leurs respirations… De là, des capteurs transforment ces mouvements en musique et ce qui est joué en direct est la « voix de l’air ». Poétique, bluffant.
Algo-r(h)i(y)thms
La suite de l’exposition est à découvrir directement au Palais de Tokyo. Nous avons juste voulu clore cet article sur ce qui fut pour nous, le clou de l’exposition.
Une expérience unique, incroyable : l’œuvre Algo-r(h)i(y)thms est « une invitation à rejoindre une séance d’improvisation musicale ». En passant vos doigts sur les cordes et en les pinçant, celles-ci résonnent alors à différentes fréquences. Certaines sont dans le domaine des fréquences audibles par l’humain, d’autres se ressentent grâce à des vibrations. Pour les « entendre », il faut s’allonger sur le sol. Des amplificateurs d’infrasons transforment le sol en une gigantesque enceinte et votre corps devient une oreille. Cette oeuvre ne se vit que par groupe de 10 personnes maximum.
Telles des araignées dans leur toile, ces fils vous montrent comment, à leur échelle, les araignées voient, entendent et appréhendent leur environnement. C’est également un moyen de montrer aux participants d’autres moyens d’expressions et de communication inter-espèces
Toutes les photos sont à retrouver sur la page Facebook @KeewegoParis.